Logo

5) Israël et Libyens en (ou hors d’) Égypte

Okay, let's recap. I hope you understand that Hawaiian and Berber cultures share many common traits, particularly those concerning fertility rituals, the use of dolls made of a cross wrapped in cloth, the cult of ancestors, the anointing of standing stones, and baskets or nets filled with provisions and food of all kinds. I also took the opportunity to show you how, in ancient times, the northern and southern Mediterranean were unified. So much so that the Greeks knew that some of their most important deities, such as Athena and Poseidon, originated in the Maghreb, and more specifically in Tunisia. We also saw the special place of the ram and animal fertility—embodied in the festival of Boujloud or Biyelman, you know, the satyr—whose cultic capital was in the oasis of Siwah in Egypt.

Une stèle d’Israël ? Plutôt une stèle des Libyens !

[Sources][Video]

Et il est temps à présent de regarder d’un peu plus près les liens entre Israël et Berbères dans l’Antiquité – c’est après tout le sujet de cette vidéo, non ? Pour commencer, est-ce que vous avez entendu parler de la stèle de Merneptah – connue aussi sous le nom de stèle d’Israël ? Cette stèle fait en effet partie d'une série de monuments datant du XIIIe siècle avant notre ère, érigés par le pharaon Merneptah à travers tout le pays au début de son règne. On y lit notamment un hymne à sa personne commémorant sa campagne militaire victorieuse en Libye et au pays de Canaan.

Le pharaon se dit vainqueur des Tjehenou – dont nous savons aujourd’hui qu’il s’agissait d’une coalition des Libyens (Libou et Mâchaouachs) avec les Peuples de la mer (Akaouash, Toursha, Rouk, Shardanes et Shakalash). Mais cette stèle est particulièrement connue pour contenir, dans sa strophe finale, la première mention supposée d'Israël (ou plutôt, des Israélites) en dehors de tout contexte biblique ; c'est également la seule mention d'Israël connue dans les textes égyptiens – et chose étonnante qui a échappé à de nombreux observateurs à l’exception d’Oric Bates, cette mention apparaît précisément dans un contexte mentionnant surtout ces fameux Libyens.

Oric Bates nous en dit un peu plus sur cette stèle. Il nous raconte ainsi (P220) qu’après cette victoire de Merneptah s’ensuivit une période de troubles qui vit les Libyens finir par s’implanter en Egypte à force de raids, ceci entraînant l’exode de populations Egyptiennes vers le sud. Jusqu’à ce que Ramses III monte sur le trône et se décide comme son ancêtre avant lui à engager une campagne militaire.

Oric Bates mentionne aussi la jonction faite avec d’autres bandes de pillards, ces fameux « peuples de la mer  », venant du Levant, les « Denyen, Weshesh, Shekelesh, et Sherden, les Thekel et Peleset  » - ces derniers évoquant les Philistins de la Bible. L’arrivée de ces alliés aurait stimulé les ambitions de revanche des Libyens qui avaient été défaits à Merneptah. Oric Bates P144 note aussi que, sur les monuments Égyptiens du Nouvel Empire, les Libyens sont représentés maniant des épées de type Sud Européen, à un moment où la Sardaigne riche en métaux était contrôlée au moins partiellement par l’un de ces mystérieux peuples de la mer, les Sherden. Tout ceci donne une image d’une Afrique du Nord et d’une Europe du Sud beaucoup plus intégrées qu’on ne l’imagine. Étonnant non ? Je veux dire, étonnant qu’on l’ait si vite oublié, vous ne trouvez pas ?

La sortie d’Egypte, ou la sortie de Siwah ?

[Sources][Video]

Mais ça n’est pas tout, figurez-vous qu’Oric Bates nous rapporte une légende arabe concernant Siwah – vous savez, cette oasis qui était la capitale de la divination Berbère que l’on connaissait même jusqu’en Grèce. Cette légende raconte comment:

L’un des gouverneurs d’Egypte imposa des sanctions sur une partie de son peuple, qui décida de fuir dans le désert avec peu de nourriture. Au bout de quelques temps, leur nourriture épuisée, ils virent un bélier qui trottait vers les collines et le suivirent. Ils arrivèrent dans une ville dont les habitants ne payaient aucun impôt et vivaient au milieu d’arbres, rivières et de jardins – et qui, à leurs dires, n’avaient jamais eu d’échanges avec le monde extérieur. Les fugitifs finirent par revenir en Egypte mais, ils ne purent jamais plus retrouver le chemin vers cette ville merveilleuse.

Bon, Oric Bates n’a pas fait le rapprochement, mais moi cette histoire d’un Pharaon tyrannique, d’une fuite d’Egypte dans le désert, d’un bélier miraculeux (souvent en or) et l’arrivée dans une contrée merveilleuse ça me rappelle furieusement l’histoire de la sortie d’Egypte ? « Bi’ibilou Yatsanou mitsrayim …  » … Vous vous rappelez, ce chant judéo-marocain que l’on chante le soir de Pessah ? J’avoue j’ai toujours eu des doutes sur le sens exact de ‘eGeL le veau en hébreu – moi j’y vois plutôt un bélier, ‘aGaLah signifiant une roue, une charrette. Comme les cornes en spirale du bélier, mais bon passons, on verra ça plus tard.

Mahasuk et les 100 frères – Face A(mazigh)

[Sources][Video]

Car maintenant mes enfants, il est temps de passer aux choses sérieuses. Le Paraklet vous a promis de vous raconter des belles histoires et le Paraklet tient toujours ses promesses. Et vous allez voir que nous sommes trèèèès loin d’avoir épuisé la question troublante du lien entre Israël et Berbères. Approchez-vous. Installez-vous confortablement, et venez écouter l’histoire incroyable de Mahasuk, telle qu’elle fut recueillie par Leo Frobenius dans son recueil des Contes Kabyles publiés entre 1912 et 1914 (Tome III P187-190).

C’est l’histoire de 100 frères turbulents. Un jour, une veuve en a marre et vient voir le sultan en lui disant:

 Ces cent enfants sont méchants et mal élevés! C'est une véritable calamité! Bien sûr, ce n'est pas toujours facile pour une famille d'avoir à élever une si nombreuse progéniture. Mais un si grand nombre d'enfants aussi mal élevés et aussi méchants, on n'a jamais vu ça ! S'ils se comportent déjà aussi mal à cet âge, de quoi seront-ils capables quand ils seront adultes, grands et forts? Je suis persuadée qu'ils se mettront à comploter pour te renverser et installer un des leurs à ta place comme Sultan de cette ville! » Le Sultan réfléchit un moment avant de réagir : « Qu'en penses-tu ? que me conseilles-tu ? Que dois-je faire pour éliminer ce danger qui me menace? » — « A ta place, suggéra la veuve, je les ferais tous arrêter, je les ferais enfermer chacun dans un sac et je les ferais jeter à la mer pour les noyer! »

Le sultan décida de suivre l’horrible conseil de la veuve indignée et fit arrêter les 100 petits. Mais, profitant du sommeil des gardiens, l’aîné éventra les sacs et s’échappa avec ses 99 frères dans la forêt proche pour y trouver refuge.

Ils marchèrent plusieurs jours à travers la forêt, s'éloignant toujours plus de la mer. Un jour, Mahasuk [- notre fameux aîné ingénieux -] aperçut au loin une fumée qui montait vers le ciel. Il fit signe à ses frères de faire halte et leur dit: « Voyez cette fumée là-bas. Il y a sûrement une maison, et des gens qui y vivent. Restez tous ici sous les ordres du deuxième frère et attendez mon retour. Je vais aller là-bas pour voir si je peux trouver de quoi manger. Si je tombe sur des monstres cruels, je serai le seul à périr. Si je ne suis pas revenu au bout de quatre jours, continuez votre chemin à travers la forêt, mais en prenant une autre direction. » Puis il prit congé de ses frères et s'en alla.

Mahasuk arrive alors dans la maison où il trouve une vieille femme qui lui raconte qu’une jument rendue folle par des vers terrorise une région en galopant en tous sens, tuant et dévorant tout homme qui passe à sa portée. Elle lui révèle aussi un endroit où est emmagasinée une grande quantité de semoule et lui dit : « Tu peux rapporter tout ce que tu veux. Tu n'as qu'à en prendre suffisamment pour cent galettes, je les ferai cuire et tu pourras les distribuer à tes frères qui ont faim dans la forêt ».

De retour au campement, Mahasuk apprend qu’un plus jeune frère s’est éloigné du camp et s’est fait attraper par un chacal.

Armé de son gros bâton, Mahasuk partit aussitôt dans la direction indiquée. Il se faufila vers le chacal qu'il tua d'un violent coup de bâton. Le petit frère fut récupéré sain et sauf  […] Une fois qu'ils furent tous réunis, Mahasuk leur distribua les galettes et leur dit : « A présent, chacun de vous a une galette. Vous pouvez la manger entièrement, mais vous pouvez aussi en garder une part pour plus tard. Je vais encore partir et vous laisser seuls ici. Je vais essayer de nous trouver un logis confortable, et de quoi nous nourrir. Restez ici tous ensemble jusqu'à mon retour et obéissez aux ordres de votre grand frère! » Mahasuk prit congé de ses frères et s'en retourna auprès de la vieille femme.

La vieille femme lui apprend alors où trouver la terrible jument – près d’une source où elle vient se désaltérer. Mahasuk s’y poste en embuscade et lui assène des violents coups de bâton sur les naseaux chaque fois qu’elle se penche pour boire. 7 fois en tout. Chaque coup fait tomber un des 7 vers qui la torturaient. Libérée de ses tourments, la jument se met au service de Mahasuk.

De retour au campement:

...et après que tout le monde eut mangé sa galette, Mahasuk, toujours juché sur la jument, conduisit ses frères à la hutte de la vieille femme si généreuse. Celle-ci leur indiqua volontiers le chemin conduisant à la ville abandonnée. Les cent garçons s'y rendirent et après une rapide inspection, il s'avéra que la ville offrait les meilleures conditions de vie qu'on pût espérer. Ils s'y installèrent donc et menèrent une vie agréable, ne manquant de rien, la ville étant bien pourvue en tout.

Au bout de quelques temps toutefois, Mahasuk décida de rentrer avec ses frères dans leur terre natale. Chacun d’eux arriva dans la ville monté sur un beau cheval et puissamment armé, et ils mirent en déroute le Sultan et ses partisans qui avaient tenté de les faire noyer. « Les gens de la cité décidèrent d'élire Mahasuk, l'aîné des cent frères, Sultan de la ville et de tout le pays  ».

Mahasuk et les 100 frères – Face B(ible)

[Sources][Video]

Cette histoire de Mahasuk est incroyable. J’imagine que vous savez pourquoi ? Non ? Mais enfin, c’est une réplique fidèle de celle de l’Exode. Oui, encore et toujours l’Exode. Avec MahaSuK dans le rôle de … MoShe - Moïse, évidemment ! « Bi’ibilou Yatsanou mitsrayim …  » … Regardez, l’histoire commence par cette vieille qui se plaint du grand nombre de ces enfants turbulents au roi et du risque que cela fait peser sur son règne :

Or, les enfants d’Israël avaient augmenté, pullulé, étaient devenus prodigieusement nombreux et ils remplissaient la contrée. Un roi nouveau s’éleva sur l’Égypte, lequel n’avait point connu Joseph. Il dit à son peuple : « Voyez, la population des enfants d’Israël surpasse et domine la nôtre. Eh bien ! usons d’expédients contre elle ; autrement, elle s’accroîtra encore et alors, survienne une guerre, ils pourraient se joindre à nos ennemis, nous combattre et sortir de la province. » Et l’on imposa à ce peuple des officiers de corvée pour l’accabler de labeurs et il bâtit pour Pharaon des villes d’approvisionnement, Pithom et Ramessès. Mais, plus on l’opprimait, plus sa population grossissait et débordait et ils conçurent de l’aversion pour les enfants d’Israël. Exode 1.7-12

Après avoir tenté de ralentir leur expansion démographique, le Roi décide de faire noyer les enfants – mais ses commis ne suivent pas vraiment ses indications :

Le roi d’Égypte s’adressa aux sages femmes hébreues, qui se nommaient, l’une Chifra, l’autre Poûa. et il dit : « Lorsque vous accoucherez les femmes hébreues, vous examinerez les attributs du sexe : si c’est un garçon, faites-le périr ; une fille, qu’elle vive. » Mais les sage-femmes craignaient Dieu : elles ne firent point ce que leur avait dit le roi d’Égypte, elles laissèrent vivre les garçons. […] Pharaon donna [alors] l’ordre suivant à tout son peuple : « Tout mâle nouveau-né, jetez-le dans le fleuve et toute fille laissez-la vivre.  »

De même, lorsque les commis du Roi rentrent à la ville, ils sont récompensés par le peuple qui croit que les commis les ont délivrés de ces horribles garnements qui leur causaient tant de soucis. Tandis que dans l’Exode, au verset 21 d’ailleurs un peu obscur, les sage-femmes sont, elles, récompensées par Dieu qui leur fait construire des maisons.

Quoi qu’il en soit, les enfants finissent par s’échapper et errent dans la forêt – comme les enfants d’Israël finissent par quitter l’Égypte et errer dans le désert. Moïse/Mahasuk voit une lumière au loin – et cette fois, c’est le Coran le plus proche, Sourate Al Qasas – les récits légendaires - 28.29 ;

Puis, lorsque Moïse eut accompli la période convenue et qu’il se mit en route avec sa famille, il vit un feu du côté du Mont. Il dit à sa famille: «Demeurez ici. J’ai vu du feu. Peut-être vous en apporterai-je une nouvelle ou un tison de feu afin que vous vous réchauffiez.

Mahasuk évoque d’ailleurs les monstres cruels, et là cela rappelle les habitants de Canaan, cette terre qui mange ses habitants.

Ensuite, il y a cette histoire de semoule et de galettes, que Mahasuk distribue à ses frères, qui n’est que la réplique de celle de la Manne.

A cette vue, les enfants d’Israël se dirent les uns aux autres : « Qu’est ceci ? » car ils ne savaient ce que c’était. Et Moïse leur dit : « C’est là le pain que l’Éternel vous donne pour nourriture.  » Exode 16.15.

On retrouve même cette mention sur le stockage dans la version Kabyle : « Vous pouvez la manger entièrement, mais vous pouvez aussi en garder une part pour plus tard  » version inversée de celle de l’Exode : « Moïse leur dit : "Que nul n’en réserve pour le lendemain."  » Exode 16.19.

Quant à l’histoire du jeune frère sauvé par Mahasuk à coup de bâton, elle me fait penser à celle de l’esclave hébreu sauvé par Moïse :

Il aperçut un Égyptien frappant un Hébreu, un de ses frères. Il se tourna de côté et d’autre et ne voyant paraître personne, il frappa l’Égyptien et l’ensevelit dans le sable. Exode 2.11.

Enfin, notez que Mahasuk laisse ses frères sous la garde de leur grand frère. Tout comme Aharon, le grand frère de Moïse, joue aussi le rôle de second, en particulier lorsque Moïse se rend dans la montagne pour y recevoir les tables de la Loi. « Et Moïse dit à Aaron son frère: «Remplace-moi auprès de mon peuple, et agis en bien, et ne suis pas le sentier des corrupteurs»  » Sourate Al Araf 7.142.

Ensuite, l’histoire de la jument près de la source que Mahasuk frappe 7 fois avec son bâton me fait aussi penser à l’histoire de Moïse frappant le rocher pour en faire jaillir de l’eau. Elle me fait aussi penser à l’histoire des 12 sources du Coran racontée dans la Sourate Al Baqara 2.60 ou dans les Nombres 33.9 ou encore à celle de la Chamelle et des Thamud dans le Coran. Même si la ressemblance est moins nette, je dois bien vous l’avouer – d’autres creuseront certainement la question après moi.

Quoi qu’il en soit, guidé par la vieille, Mahasuk et ses frères arrivent dans une ville abandonnée qui:

...offrait les meilleures conditions de vie qu'on pût espérer. Ils s'y installèrent donc et menèrent une vie agréable, ne manquant de rien, la ville étant bien pourvue en tout.

Là, c’est bien sûr de la conquête de Canaan qu’il s’agit. Quant à la fin de l’histoire de Mahasuk qui se termine par le retour et la victoire de Mahasuk et ses frères sur le Sultant et ses affidés, c’est, dans l’ordre inverse, de la noyade de Pharaon et de son armée dans la Mer Rouge dont il s’agit.

Et bien sûr, la vieille chez qui Mahasuk se rend à plusieurs reprises, qui lui offre les 100 galettes et lui fournit toutes les informations pour le guider dans ses aventures, c’est évidemment Dieu, l’Éternel, dans la Bible. Allah dans le Coran. La source de guidance. Oui mes enfants, l’histoire de Mahasuk, ça n’est rien d’autre que l’histoire de l’Exode racontée d’une autre façon. Ou inversement d’ailleurs, l’histoire de l’Exode, ça n’est autre que l’histoire de Mahasuk racontée d’une autre façon. Et l’une comme l’autre font d’ailleurs écho à cette légende arabe sur la fuite d’esclaves vers l’oasis de Siwa.